Baffrancou à Limousis (11), France 

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Je n’aimais pas vraiment ma grand-mère maternelle. Elle était dure et souvent même méchante avec moi et ma mère. C’est elle qui m’a mis la peur au ventre de devenir comme mon père. Avec sa voix grave et rauque, due à la cigarette, dès que nous sommes venus vivre avec elle quand j’avais 6 ans, elle n’arrêtait pas de me répéter : « Tu es comme ton père ! ». Avec le recul, je comprends très bien et je ne peux pas lui en vouloir. Elle était une survivante de l’Holocauste et a passé plusieurs années dans les mines de sel en Norvège. À son retour, ses dents étaient tellement pourries qu’elle les a toutes fait enlever d’un coup, sans anesthésie. 🦷

Son mari, qui était l’amour de sa vie, n’est pas revenu des camps. J’ai vu des photos d’elle d’avant-guerre et j’ai récemment aussi découvert des coupures de journaux où elle et mon grand-père étaient mentionnés comme artistes à des soirées à Amsterdam. Quelque part à l’intérieur de moi, je n’ai jamais vraiment compris où se trouvait la jolie petite jeune femme rousse espiègle que je semblais voir sur les photos. J’ai vécu avec elle pendant six ans et elle passait tout son temps devant la fenêtre à jouer au solitaire, ou à la patience comme on appelle ce jeu aux Pays-Bas. Son bras droit était bronzé à force d’être assise à côté de la fenêtre au troisième étage. Un jour, elle m’a dit qu’elle attendait mon grand-père, que sans lui la vie n’avait pas de saveur pour elle et qu’elle attendait son départ… 🧳

Je connais bien cet état. Ma mère est morte des séquelles des camps et son père lui a terriblement manqué toute sa vie. Elle avait tout perdu, son père, sa mère, sa vie luxueuse et la promesse d’une vie heureuse. Elle est décédée d’un double cancer indiquant son incapacité à vivre par et pour elle-même. Je connais bien cet état, car je l’ai hérité de cette lignée de femmes. J’ai même traversé une partie de ma vie avec les mêmes maladies… le temps de changer de cap, d’attitude, d’intention ou de comportement. Vivre pour moi n’a pas de sens. Selon ma vision des choses, nous sommes ici pour vivre l’Unité à partir de notre diversité. De mon point de vue, leur histoire a simplement réveillé mon enfant indigo, sincèrement altruiste… 😍

Si je commence mon article du jour en parlant de ma grand-mère c’est parce que je pense régulièrement à elle ces derniers temps, car depuis environ deux ans moi aussi je joue au solitaire. Je ne le fais pas avec des cartes physiques comme elle, mais sur mon iPad. Solitaire, Sudoku et Scrabble sont les deux trois auxquels je joue quotidiennement. Mon intention est de garder mon esprit vif et ma mémoire aussi intacte que possible. Au Solitaire, mon meilleur temps est de 1 minute 6 secondes. Au Sudoku, je joue au niveau 2 sur 4 et mon meilleur temps est de 5 minutes. Les autres niveaux sont trop compliqués pour moi pour le moment. Avec ces deux jeux, je cherche à chaque match à battre mon propre record. Scrabble, je joue avec des amis en ligne et c’est l’une des façons dont je maintiens notre lien vivant. ♣️

Les deux jeux que je joues seul m’apprennent encore des choses sur moi-même. Sur certains sujets, je peux être vraiment sûr de moi. Cependant, je sais que je peux involontairement inventer des réalités ou fabriquer des souvenirs. Je l’ai vu en direct plusieurs fois dans ma vie. Du coup, dès que je suis face à quelqu’un qui cherche à dominer avec ses propres certitudes, je ne m’accroche plus à ma vérité et je lâche vite prise. En jouant à mes jeux, je peux me retrouver dans des impasses, simplement parce que je n’ai pas vu LE mouvement évident à faire avec les cartes ou avec les chiffres. Je suis systématiquement confronté à l’évidence qu’il y a des choses qui m’échappent. Surtout, alors que je vieillis, je redouble de vigilance… 🤔

Chaque jeu m’implique dans un apprentissage essentiel de la Vie. Il y a un ordre dans lequel les choses apparaissent dans mon histoire. Si je lâche prise et mets mon ego de côté, je traite les événements dans l’ordre d’apparition. Le jeu Solitaire m’entraîne à ne pas penser ou anticiper, mais juste à jouer le jeu comme il vient. Donc je ne cherche pas forcément à gagner, mais juste à lâcher prise et à voir toutes les possibilités sans en rater aucune. 🃏

Avec Sudoku (je mélange toujours les voyelles de ce mot), j’essaie de penser « hors de la boîte ». Je constate souvent qu’une fois que j’ai créé une technique qui fonctionne, je fige mes habitudes. En jouant à ce jeu, j’essaie de penser différemment et ainsi repousser les limites de ma logique. C’est assez difficile pour moi et je n’ai réussi à ajouter que 3 alternatives à ma technique de base. Avec ça, je termine des parties de niveau 2 entre 5 et 15 minutes, mais je ne suis pas assez fort pour passer au niveau 3. C’est ce manque de gymnastique cérébrale qui m’empêche de bien jouer aux échecs ou de débuter des cours de piano… mon cerveau n’est pas assez élastique dans certains domaines… 🎹

Avec Scrabble, je me retrouve avec un mélange des deux autres jeux. J’essaie de trouver LE mot évident à poser… jouer avec les lettres afin de trouver le mot qui rapporte le plus de points… améliorer ma technique… et sortir des sentiers battus et trouver des mots que parfois je ne connais même pas. Comme ce jeu se joue à deux, j’essaie aussi de ne pas jouer pour gagner, mais de jouer pour jouer et juste garder le plaisir d’échanger ainsi. Avec le partenaire avec qui je joue en ce moment, je gagne souvent. J’aime beaucoup qu’elle ne se décourage pas. J’ai souvent l’impression de gagner simplement parce qu’elle s’en fiche. Alors elle m’apprend à faire pareil et à simplement jouer avec les lettres que j’ai, sans forcément chercher le meilleur score. 🔠

Avec le Scrabble, il y a aussi un autre phénomène dont je suis conscient… mais que je n’ai pas encore exploré. Pour moi, il est évident que les mots ne surgissent pas au hasard. Parfois j’ai envie d’écrire tous mes mots, ou de demander à ma camarade de jeu de le faire avec les siens, puis à la fin du jeu d’en faire des phrases spontanées pour voir ce que cela donne. Jusqu’à présent, j’étais trop paresseux pour le faire… mais, qui sait… ㊙️

Eh bien, cela nous amène à la partie principale de mon article d’aujourd’hui. Ce matin, sous la douche, je me posais justement la question : « Est-ce que je dois vraiment faire travailler mon cerveau pour qu’il reste efficace ? ». Dans notre société, l’efficacité est importante et l’hémisphère gauche (le côté rationnel) de notre cerveau est à mon avis hypertrophié, tandis que le droit (le côté intuitif) est plutôt atrophié. Si j’ai avancé jusqu’ici tant sur mon chemin, c’est selon moi parce que j’ai réussi à corriger petit à petit le déséquilibre entre les deux hémisphères et à donner plus de place à ma sensibilité, mon intuition et ma créativité. En plus, le côté gauche nourrit notre vision dualiste… alors le côté droit nous permet de percevoir la discontinuité entre les choses. 😌

Ceci dit, je pense qu’un être réalisé est tout simplement là… et que sa richesse se trouve dans sa qualité de présence, le niveau de sa conscience et sa façon de vibrer en toute simplicité avec toute Vie… et non dans ces aptitudes intellectuelles cérébrales. De mon point de vue, un vrai maître n’est maître que de lui-même et n’a pas de disciples… C’est quelqu’un qui a simplement réussi à retrouver sa conscience originelle et qui a cessé de se prendre pour le nombril du monde et le propriétaire de la terre. Comme un animal, il vient, il passe et il repart sans brouhaha et sans laisser de trace. Mon chemin me mène de plus en plus vers cela… et la Vie m’invite peut-être encore plus à mettre la tête de côté et à ralentir mon cerveau… afin de laisser de plus en plus de place à l’homme-chat en moi. ..😉

Je vous souhaite une journée, soirée ou nuit extraordinaire… où que vous soyez… ∞❤️∞ 

Slow down… ☺️