Jongler avec la saturation

Modi’in, Israël 🇮🇱 

Je vis comme en France, ça y est ! Ma tendance depuis presque deux ans est de me retirer comme un ermite dans mon ermitage ou comme le chien berger sur son promontoire… attendant que quelqu’un ait besoin de mes services. C’est ainsi que je me sens le mieux, être avec, sans me fondre dedans. J’ai toujours aimé observer les gens et la vie de loin, mais c’est seulement depuis peu que je fais cela avec la conscience que c’est ainsi que mon Etre fonctionne le mieux à travers mon petit moi. 

Alors, je suis la plupart du temps tranquillement dans ma chambre en train de travailler mon hébreu, alternant mes cours avec des épisodes d’une série sur Netflix. Je progresse incontestablement et j’en suis fier. Je n’ai jamais réussi à retenir autant de mots en aussi peu de temps. Certes, malgré tout ça va lentement et c’est un vrai travail de fourmi. Chaque mot doit traverser tout un processus avant qu’il s’accroche quelque part dans mon cerveau. Ensuite, comme je pratique l’hébreu peu verbalement, faut-il encore que j’arrive à utiliser réellement mon vocabulaire grandissant. 

Je jongle avec la saturation. Okay, je n’ai plus 20 ans non plus, mais je pense que j’ai toujours eu la même limite dans l’apprentissage. Ma tête ne peut qu’absorber qu’une certaine quantité d’information à la fois. Une fois mon seuil atteint, je le sens dans mon ventre comme si j’étais en “burn out”. Si ce n’est pas trop fort, je change d’application d’apprentissage. Si j’ai trop tiré sur la corde, je suis obligé de quitter les cours et d’y revenir plus tard. Et quand je trouve la bonne vitesse de croisière, je peux même mettre les mots d’hébreu en boucle pour la nuit. 

Trouver la juste distance avec les gens et bien rester centré…

En ce moment, je ne peux faire que quelques cours d’hébreu sur Duolingo par jour, car la grammaire est un peu compliquée et demande beaucoup de mes ressources cérébrales. Typique pour la langue sont les contractions et le fait que certaines terminaisons ne sont pas toujours prononcées pareils. Un exemple simple est “Je m’appelle Michael”… ce qui se traduit mot par mot par “Ha shem shel ani Michael”… ce qui se contracte finalement en “Shmi Michael” ! Entre les nouveaux mots, leur ordre dans les phrases, les contractions et les caractères en hébreu, mon cerveau couine parfois comme une vieille porte en fin de vie. 

Mais, pas de stress ! C’est juste mon désir profond de m’exprimer dans la langue que j’ai tant aimée et que j’ai occultée pour ne pas souffrir du manque de mon père, mon chien, mes amis et ma terre. Dans le fond, ça n’a pas vraiment d’importance. Je suis ici, c’est tout ce qui compte… et tout le monde parle l’anglais. Mais, quand je sens que les mots tiennent dans la toile de mes neurones, je sens de la joie qui me relie à l’époque de ma petite enfance. Pourtant, je ne cherche pas à revivre ce temps révolu. La sensation que j’ai est celle d’un puzzle dont les dernières pièces comblent les trous restants. 

Sans rien faire, les choses évoluent d’elles mêmes. Après 5 jours de pause alimentaire, je suis à nouveau invité ce soir dans la famille de mon Ami diplomate, pour célébrer l’ouverture du shabbat, et demain midi je vais dans la famille de John, pour partager le déjeuner avec eux. J’ai même acheté ma propre kippa, un geste très symbolique pour dire que je suis bel et bien chez moi ici. D’ailleurs, je le sens de jour en jour un peu plus. Même si dans ma conscience il n’y a aucune différence entre l’Israël, la France ou les Pays-Bas, quelque chose dans mon corps semble se poser ou se détendre un tout petit peu plus que dans d’autres endroits où j’ai déjà pu me sentir chez moi. 

Dimanche, je vais à Ramlah pour démarrer le processus officiel de mon Aliyah, l’immigration d’un juif qui rentre au pays. Je pense qu’ensuite les choses vont se produire en cascade comme une ligne de pièces de domino posées, qui tombent l’une après l’autre, une fois que la première a été bousculée. En même temps, loin avant que je puisse le soupçonner, du travail me pend au nez… 

Rosa, l’amie chez qui je suis hébergé a trouvé du travail dans un hôtel Hilton à Jérusalem et elle a parlé de moi au recruteur. J’en ai profité pour me présenter à lui par WhatsApp et j’attends la suite. En même temps, la femme de mon ami diplomate cherche aussi pour moi et a peut-être trouvé quelque chose dans un hôtel Continental à Tel Aviv. Elle m’a carrément demandé un CV, que j’ai dû rapidement refaire dans la nuit d’avant-hier. Après l’avoir effacé de mon ordinateur, il y a plus de 20 ans, j’ai pensé que je n’en aurai plus jamais besoin.

C’est bizarre de percevoir comment ma position intérieure a complètement changé depuis que je suis ici. En France, le mouvement allait plutôt vers l’intérieur vers de plus en plus de calme et de solitude. Je ne me voyais plus vraiment faire partie de la société. Je me voyais plutôt faire des incursions sur demande pour de l’accompagnement ou de l’animation. Ici, dans ma neuvième vie, tout est en train de changer. Il semble que je vais prendre ma place d’israélien parmi les israéliens et que je vais avoir une couverture sociale avec tout ce que cela implique. Je me sens prêt et même impatient de participer à la vie ici et de travailler bientôt à nouveau.  

∞💜∞  

Mythique… J’adore ! 


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4 commentaires sur « Jongler avec la saturation »

  1. Je suis passé à deux repas liquides par jour (matin et midi).
    Jus de fruits et légumes à l’extracteur.
    C’est ludique car je n’y connais pas grand chose en légumes, et donc j’apprends.
    Pour le moment je garde le repas du soir solide.

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