Die (26), France đ«đ·
Jâai de quoi dire sur la parole, sur ma parole. « Ma parole⊠» Tant que je me souviens jâĂ©tais bavard. Disons plutĂŽt que jâavais besoin de beaucoup de mots pour dire ce que je vivais ou ressentais. Il est Ă©vident que pour une grande partie ça venait de ma blessure de rejet. Il est clair que de ne pas avoir Ă©tĂ© vu par mon pĂšre a du me mettre dans une hyper-activitĂ© verbale afin de montrer Ă mon entourage que jâexistais. đŁ
Au dĂ©part, il me semble que tout Ă©tait normal. Je vivais en Israel, parlais lâhĂ©breu et je pense que je me fondais dans la masse. Je commençais Ă remarquer la parole en quittant mon pays natal quand j’avais 5 ans et demi. Remarque, jâai un petit souvenir intĂ©ressant antĂ©rieur Ă mon dĂ©part liĂ© au langage. J’ai du avoir 2 ou 3 ans. Ma grand-mĂšre qui Ă©tait hollandaise me parlait dâen haut de l’escalier de la maison oĂč j’habitais. Je me souviens que je comprenais ce quâelle me disait. Par contre, elle se fĂąchait, car je lui rĂ©pondais en hĂ©breu, sans comprendre que ce nâĂ©tait pas la mĂȘme langue. Câest grĂące Ă ce souvenir que jâai compris plus tard que les petits enfants comprennent sĂ»rement toutes les langues. đ¶đ§
En arrivant aux Pays-bas, il parait que je me suis tu pendant 3 semaines. AprĂšs jâai occultĂ© lâhĂ©breu pour ne parler que le NĂ©erlandais. Le rejet dont je parlais se renforçait par le manque dâĂ©locution et de l’antisĂ©mitisme Ă mon Ă©gard. En plus, ma grand-mĂšre ne pouvait pas me piffer, car je ressemblais beaucoup trop Ă lâhomme qui âavait rendu sa fille malheureuseâ. đ€š
Celle avec qui jâaurais pu parler, ma mĂšre, nâĂ©tait jamais lĂ . Elle travaillait beaucoup pour joindre les deux bouts et pour pouvoir louer un appartement Ă nous deux et quitter ainsi sa mĂšre chez qui nous habitions pendant 6 ans. Et quand je voulais mâexprimer, il y avait toujours ma grand-mĂšre qui passait par dessus, rĂ©clamant toute lâattention. Alors, je pense quâĂ partir de ce moment-lĂ je commençais Ă fonctionner comme dans une fil dâattente qui bouchonne. Je me taisais ou je parlais sans cesse. đ€Ș
Jâaurais aimĂ© pouvoir parler librement pour vider mon sac, mais trĂšs jeune dĂ©jĂ je voyais que de parler beaucoup ne faisait quâaggraver mon cas. Car, en fait, je ne savais pas vraiment comment m’exprimer convenablement, comment doser ma parole, comment exprimer mon besoin ou comment rĂ©gler un conflit. Je ne savais pas non plus comment rester ami avec quelqu’un aprĂšs un conflit. Je ne l’avais jamais appris… đł
Vers mes 14 ans, prenant exemple sur un copain de classe trĂšs populaire, Tali, je commençais Ă faire de lâhumour. Jâavais compris que tout le monde Ă©coutaient celui qui fait rire. Bon, il fallait du temps pour que lâhumour chez moi se dĂ©veloppe dâune maniĂšre saine. Au dĂ©part je ne pense pas avoir Ă©tĂ© drĂŽle du tout. En tout cas, pas de maniĂšre spontanĂ©e⊠Les blagues Ă©taient une trĂšs bonne solution et je suis devenu un excellent conteur dâhistoires drĂŽles. đ
Jâai grandi ainsi sans jamais vraiment avoir Ă©tĂ© entendu, ni compris. Jâai passé beaucoup de mon temps et de mon effort Ă essayer de comprendre et entendre les autres sans jamais rĂ©ussir Ă exprimer vraiment ce qui se passait pour moi, en moi. Dâailleurs, la pathologie qui va avec ce conflit est la rĂ©traction des gencives, ce que jâai depuis longtemps. Les rares personnes qui prenaient vraiment le temps de me dĂ©couvrir sont devenu des ami(e)s indispensables Ă ma vie. đšââ€ïžâđâđš
Mais, jâavais tellement besoin de mots⊠tellement⊠encore et encore. Et quand je parlais j’avais cette sensation que je nâarriverais jamais Ă rattraper les paroles qui s’Ă©taient Ă©chappĂ©es et qui se perdaient. Je me souviens Ă quel point je pouvais mâemballer dans un humour « pas drĂŽle du tout » quand jâĂ©tais tout jeune et que par la suite ma mĂšre nâarrivait plus Ă mâarrĂȘter. Ensuite, je me bloquais et il me fallait des mois pour revenir et retrouver ma normalitĂ© intĂ©rieure. De la mĂȘme maniĂšre, quand il y avait quelque part un conflit, les paroles qui sâaccumulaient rendaient le problĂšme encore plus compliquĂ©. A lâĂ©poque je ne savais pas encore comment mâarrĂȘter. đ
La parole a toujours Ă©tĂ© trĂšs compliquĂ©e pour moi. Je avais des tensions Ă©normes des mois Ă lâavance quand jâavais un discours Ă faire dans ma classe. Et ne parlons pas des filles⊠JâĂ©tais complĂštement dĂ©semparĂ©, complexĂ© et fermĂ©. Et quand, vers mes 20 ans, pour la premiĂšre fois un copain sâintĂ©ressait Ă mon histoire, je me souviens que nous sommes restĂ©s dans sa voiture pendant 3 heures. Je parlais, il Ă©coutait… A la fin, peut-ĂȘtre parce qu’il  faisait des Ă©tudes de mĂ©decine, il me conseillait dâaller voir un psychiatre. Une vraie douche froide. đż
La toute premiĂšre personne avec qui je me suis vraiment senti entendu et qui mâentendait mĂȘme si je ne parlais pas, Ă©tait la compagne avec qui jâai vĂ©cu pendant 21 ans. Dâailleurs, je maintient notre lien que je trouve toujours beau et vivant. Je lâaime encore et elle restera toujours mon Amie, beaucoup plus mĂȘme. Encore aujourdâhui, quand jâai besoin dâĂȘtre compris, je sais qui sont les quelques personnes vers qui je peux me tourner… et il nây en a pas beaucoup. Si encore je nâavais rien Ă dire⊠Mais câest tout le contraire ! Jâai tellement Ă partager⊠et aujourdâhui plus que jamais. đ
Et lĂ , un phĂ©nomĂšne se produit. Tout doucement depuis des annĂ©es ma parole se libĂšre grĂące Ă ceux qui voulaient bien entendre ce que jâavais Ă dire. Jâai passĂ© la plus grand partie de ma vie Ă essayer de me taire, de rĂ©duire mon dĂ©bit de paroles⊠car la parole et le mental Ă©tait mal-jugĂ©s dans le cheminement spirituel que je parcourais. Des annĂ©es pleines des âtropâ ou des âpas assezâ ou encore des âtrop douxâ ou âtrop durâ. CâĂ©tait une histoire qui semblait sans fin. đ€š
Ma parole se libĂšre⊠et avec ma âclair-sentenceâ qui grandit annĂ©e aprĂšs annĂ©e, elle devient de plus en plus juste. En plus, ce flot qui se met en mouvement, quand il se libĂšre, depuis une douzaine dâannĂ©es, mâamĂšne dans un Ă©tat de transe, de canal. Quand je parle devant un groupe, parfois mes paroles me transportent et je perds la tĂȘte. Je ne sais plus oĂč je suis, qui je suis, ce que je suis venu faire⊠mais je continue Ă parler. Et pas de nâimporte quoi, semblerait-il. Il suffit quâil y ait quelques personnes avec une Ă©nergie de vie bien vivante et je pars au quart de tour. đ€©
Ma parole se libĂšre⊠et depuis peu il y a des gens qui au lieu de me raisonner et d’essayer de me calmer, me valident, me stimulent, mâencouragent et mâĂ©coutent. Ils mâĂ©coutent VRAIMENT⊠avec les oreilles et le coeur. Chez Amma, câest ce que jâai vĂ©cu pendant les trois jours avec la plupart de mes ami(e)s. DĂšs que je me sentais accueilli je commençais Ă blablater sans pouvoir me calmer, finissant par ne mĂȘme plus l’essayer. GrĂące Ă cette Ă©coute vraie que jâai reçue, jâai pleurĂ© de bonheur Ă Â plusieurs reprises.  CâĂ©tait surtout ça qui mâa fait vibrer autant pendant ces trois jours⊠ma parole accueillie ! đ
Ma parole se libĂšre et elle libĂšre aujourd’hui progressivement ce qui a Ă©tait enfouie au plus profond de moi. Câest Ă moi en premier Ă Ă©couter et entendre ces paroles qui Ă©mergent de si loin et qui jaillissent par des murmures quand je suis attentif, calme et tranquille, sous des formes diffĂ©rentes… pensĂ©es, mots, gestes⊠amour. đÂ
Ma parole libĂ©rĂ©e est comme une clĂ©. Câest en parlant, justement, que la porte de mes profondeurs sâouvre. Les mots se glissent entre la porte et le battant et empĂȘchent la re-fermeture. Il suffit que je sois trĂšs prĂ©sent et que jâĂ©coute, que je m’Ă©coute. Il suffit que je laisse les mots sortir selon leur volontĂ© sans retenu et que je les laisse s’exprimer librement. Ils me racontent ce que je sens, ce que je vis et ce qui se passe Ă lâintĂ©rieur de moi. Je les Ă©coute et j’apprends… đŠ
Câest exactement ce que je vis pendant les processus d’initiation, mes animations et mĂȘme en ce moment pendant que je vous Ă©cris. Ce sont des perles qui jaillissentâŠÂ Ăa semble peut-ĂȘtre prĂ©tentieux, mais c’est ainsi que je le reconnais maintenant. Et je me dois de faire attention avant de m’exprimer pour vĂ©rifier que mon interlocuteur est bien lĂ , prĂ©sent. Car aujourd’hui, le besoin de parler est parti… Si je n’ai pas une oreille et un coeur en face, dĂ©sireux de m’entendre, je prĂ©fĂšre garder le silence. đ€«
Aujourd’hui, ma parole est devenue ma voie de passage ! Ma voix libĂšre ma voie… C’est peut-ĂȘtre ça mon Ă©tape suivante, ma voix qui m’aide Ă me connecter et Ă provoquer ainsi mon Ă©tat de canal, chaman ou alchimiste. Qui sait, le temps le dira… đ
Douce soirĂ©e Ă tous… â€đđđđđ€Â
mais quel bavard, mais quel bavard…..
Joli soir Ă toi
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Eh oui… mĂȘme deux articles bavards en une journĂ©e… đ Belle soirĂ©e, Colette
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