Danielle

Allonnes (72), France đŸ‡«đŸ‡·

J’ai du avoir 12 ans quand je suis allĂ© avec ma mĂšre voir un oncle et une tante qui avaient une petite maison sur un ilot dans un endroit idyllique au sud-est d’Amsterdam, les Vinkeveense plassen. A l’époque c’étaient tous des oncles et des tantes
 mĂȘme s’il n’étaient pas vraiment de la famille. LĂ , il y avait quand-mĂȘme un lien familial quelque part. Je pense par la femme du frĂšre de mon grand-pĂšre
 Je ne m’en souviens plus vraiment, c’est tellement loin tout ça. đŸ€”

En arrivant, il y avait la fille de l’oncle et la tante, Fransje, qui nous accueillait avec sa petite fille de 4 ans, Danielle. DĂšs qu’elle m’a vu elle m’a dit : “Je te prĂ©sente ta future femme !” Ça a dĂ» m’impressionner, car je ne l’ai jamais oubliĂ©. Et au delĂ  de ma volontĂ©, je l’ai toujours aimĂ©. CompliquĂ© pour un petit garçon complĂštement brimĂ©, complexĂ©, sensible et hyper-timide. đŸ˜„

Nous allions de temps en temps voir Fransje et son mari Jecky. J’aimais beaucoup y aller. J’adorais leur humour et quand ils commençaient Ă  plaisanter tous ensemble, ça n’arrĂȘtait pas
 Mon dieu, que c’était bon de rire comme ça, mĂȘme si je ne comprenez pas tout. J’adorais voir ce spectacle se dĂ©rouler devant mes yeux. Ça montait crescendo
 Ă  la fin ils n’arrivaient parfois mĂȘme plus Ă  respirer. đŸ€Ș

Je trouve encore cette mĂȘme complicitĂ© par l’humour avec mon ami Ruben Ă  Amsterdam. Nous rions de tout
 absolument tout
 rien est tabou
 mĂȘme pas l’holocauste. Et si parfois en cherchant Ă  dire des conneries, un des deux se trompe en sortant une bĂȘtise blessante, l’autre dit gĂ©nĂ©ralement “ça, je considĂšre comme un compliment”. Et nous rions de ça du coup aussi. 😉 

Je la trouvais belle, ma petite Danielle, et j’ai toujours Ă©tĂ© secrĂštement amoureux d’elle. La solution que j’avais trouvĂ© Ă©tait de devenir “son grand frĂšre”. Parfois, quand j’avais assez de courage, j’allais la voir chez elle et nous nous promenions avec son petit chien, un terrier Ă©cossais sur les digues. Je me sentais bien Ă  sa proximitĂ©, mĂȘme si je ne savais pas trop de quoi parler. Notre diffĂ©rence d’ñge Ă©tait un obstacle Ă©norme aussi Ă  cet Ă©poque. 😍

Il me fallait 3 tentatives pour que j’obtienne mon bac et ma derniĂšre annĂ©e au lycĂ©e Ă©tait en mĂȘme temps sa premiĂšre. La journĂ©e de la reprise je l’attendais en bas de l’escalier de l’école. Je me sentais un peu responsable d’elle et j’ai longtemps discrĂštement veillĂ© Ă  son bien-ĂȘtre et sĂ©curitĂ©. En y repensant avec le recul, je me rends compte que c’était mignon comme tout… fleur bleue et trĂšs romantique. đŸŒč

Quand j’ai quittĂ© les Pays-bas en 1985, nous n’avons pas perdu contact tout de suite. Je pense que c’était un peu plus tard, car j’ai des souvenirs oĂč je me vois l’écrire des lettres. Je me cherchais dĂ©sespĂ©rĂ©ment et il y avaient pleines de choses que je ne savais pas gĂ©rer. En mĂȘme temps, j’étais dans un mouvement de fuite et j’ai fermĂ© beaucoup de portes Ă  cette Ă©poque. Ce n’était pas volontaire, ni conscient. Ma vie Ă©tait compliqué  🙄

En 2004, j’ai appliquĂ© moi-mĂȘme un processus de deuil que j’avais Ă©laborĂ© au dĂ©cĂšs de mon chien. C’était un rituel magique, car en l’utilisant pour ma mĂšre qui Ă©tait morte 25 ans auparavant, rapidement des portes se sont spontanĂ©ment re-ouvertes vers le Pays-bas oĂč se trouvaient ses racines. J’ai retrouvĂ© des amis de l’école, de l’armĂ©e, de la famille… Et un jour, quelques annĂ©es plus tard il me semble, j’ai demandĂ© Ă  un vieil ami s’il pouvais retrouver les traces de Danielle. Facile, il m’avait dit ! 💓

Et en effet, peu de temps aprĂšs je me suis trouvĂ© avec elle sur une terrasse au bord d’un centre commercial dans le sud d’Amsterdam. Je l’ai Ă©coutĂ© longuement. Elle avait Ă©tĂ© trĂšs en colĂšre aprĂšs moi. Je n’ai pas Ă©tĂ© lĂ  pour elle quand sa vie est tombĂ© en miettes. Son pĂšre Ă©tait partie avec une autre, elle a vĂ©cu un viol en pleine rue du centre ville et se battait depuis plusieurs annĂ©es contre la fibromyalgie
 En dĂ©codant ce qu’elle me partageait, je voyais bien le rĂŽle que j’avais dans ce qui lui Ă©tait arrivĂ©. Je me sentais coupable et triste, car je n’avais pas tenu mon rĂŽle de grand-frĂšre protecteur. C’était difficile Ă  imaginer qu’elle avait vĂ©cu tant d’horreur en si peu de temps. 😔

Ensuite, j’ai tentĂ© de lui expliquer ce que j’avais vĂ©cu. Pourquoi je n’avais pas Ă©tĂ© lĂ  pour elle. Que j’avais eu besoin de toutes mes ressources pour me retrouver moi-mĂȘme et pour arriver Ă  survivre. Que j’étais dĂ©solé  Je lui ai demandĂ© pardon. Elle m’a entendu
 compris aussi. J’étais heureux de la retrouver. C’était plus tard, vers 2012 je pense, que j’ai osĂ© lui avouer mon secret. 💖

Nous Ă©tions assis sur la mĂȘme terrasse. D’abord je lui ai dit que j’avais quelque chose sur le coeur depuis trĂšs longtemps et que j’aimerais beaucoup le partager avec elle. Elle devrait d’abord me promettre de ne pas se moquer de moi. Elle me l’a promis. Alors, j’ai osĂ© enfin lui dire que je l’ai toujours aimé  😍

Quand j’ai reçu sa rĂ©ponse je suis restĂ© bouche bĂ©e. Elle m’a dit : “Moi aussi
 et j’ai t’ai attendu toutes ces annĂ©es
 mais je vais me marier la semaine prochaine
”. Nous avons pleurĂ© ensemble. C’était beau de soulagement
 et douloureux en mĂȘme temps. Douloureux car je n’ai pas su lui dire mon amour avant et cette lĂąchetĂ© m’avait coutĂ© cher. 😣

Nous nous sommes revus de temps en temps quand je revenais Ă  Amsterdam. Jamais en centre ville, bien Ă©videmment. Elle n’y vient plus jamais. Je la trouve toujours aussi belle, mĂȘme en vieillissant et grossissant. Elle a le mĂȘme humour que ses parents. J’adore
 Je la vois toujours comme au dĂ©but, petite, blonde et souriante
 mĂȘme si elle est devenu relativement sĂ©vĂšre, avec mĂȘme un peu d’amertume. Pas toujours simple de l’approcher, cette femme au caractĂšre bien trempĂ©e de juive d’Amsterdam. đŸ‘±â€â™€ïž

Elle fait partie de ces personnes que j’aime profondĂ©ment et que j’ai laissĂ© partir ce dernier temps. J’ai fini par accepter l’évidence. J’avais cette sensation qu’elle ne savait pas comment gĂ©rer ma prĂ©sence dans sa vie
 que c’était mĂȘme douloureux pour elle. Si je veux la voir c’est facile. Avec son vĂ©cu elle ne peut que travailler Ă  mi-temps, ce qu’elle fait Ă  Bodyshop Ă  l’aĂ©roport d’Amsterdam. Et quand mon avion arrive ou dĂ©colle le matin, j’y passe et je la regarde discrĂštement de loin. ❀  

C’était elle que je considĂ©rait pendant longtemps comme mon grand Amour
 MĂȘme si notre proximitĂ© n’a jamais dĂ©passĂ© un bisou sur les joues et des Ă©treintes. Mon expĂ©rience m’a servi Ă  ne plus jamais me laisser figer par la peur quand je sentais quelque chose pour une femme. Aujourd’hui je prĂ©fĂšre mourir de honte, que de mourir de lĂąchetĂ© ! 😉 

Et en effet, un peu plus tard Ă  un stage de tantra, pendant l’étĂ© de 2012 je pense, j’ai vu une femme que je trouvais belle et qui me plaisait. J’avais remarquĂ© qu’en l’approchant mon corps vibrait. Pendant que je la regardais je pensais Ă  Danielle et que plus jamais je voulais vivre les mĂȘmes regrets. 😅 

Alors, dans un Ă©lan dĂ©sespĂ©rĂ©, j’ai pris mon courage Ă  deux mains et je suis allĂ© vers elle. Je me suis plantĂ© Ă  quelques centimĂštres d’elle et je lui ai dit : “Je te trouve trĂšs belle et j’aimerais beaucoup passer la nuit avec toi !”
 Et elle me rĂ©pond : “Puisque c’est une invitation, je l’accepte !”. Wow… 🙏

Nous avons passĂ© le reste du stage ensemble et Ă  la fin nous arrivions pas Ă  nous quitter. Une relation de 6 mois s’en est suivie. C’était un coup de foudre Ă©nergĂ©tique. J’ai jamais osĂ© faire ça auparavant. J’ai ouvert cette porte grĂące Ă  Danielle
 que j’aimerais toujours
 de loin. ❀ 

Pour terminer mon article et l’annĂ©e, voici une histoire que j’aime beaucoup et que j’avais envie de partager avec vous :

Je te souhaite assez


RĂ©cemment, j’ai surpris un pĂšre et sa fille dans leurs derniers moments ensemble Ă  l’aĂ©roport. On avait annoncĂ© le dĂ©part. Debout prĂšs de la porte de sĂ©curitĂ©, ils se sont serrĂ©s et le pĂšre a dit « Je t’aime et je te souhaite assez. » 

La fille a rĂ©pondu « Papa, notre vie ensemble a Ă©tĂ© plus qu’assez. Ton amour a Ă©tĂ© tout ce dont j’avais besoin. Je te souhaite assez, aussi, papa. »

Ils se sont embrassĂ©s et la fille est partie. Le pĂšre a marchĂ© vers la fenĂȘtre oĂč j’Ă©tais assise. Je pouvais voir qu’il avait besoin et qu’il voulait pleurer. J’ai essayĂ© de ne pas m’imposer et respecter son intimitĂ©, mais il m’a demandĂ© « Vous est-il dĂ©jĂ  arrivĂ© de dire au revoir Ă  quelqu’un en sachant que vous ne vous reverriez jamais ? »

« Oui. » j’ai rĂ©pondu. « Me permettez-vous de vous demander pourquoi vous croyez que vous ne vous reverrez jamais ? ».

« Je suis vieux et elle vit si loin. J’ai de gros dĂ©fis devant moi et la rĂ©alitĂ© est que son prochain voyage sera pour mon enterrement» a-t-il dit.

« Quand vous vous disiez au revoir, je vous ai entendu dire « Je te souhaite assez. » Est-ce que je peux vous demander ce que cela signifie ? »

Il a commencĂ© Ă  sourire. « C’est un souhait qui nous vient de plusieurs gĂ©nĂ©rations qui nous ont prĂ©cĂ©dĂ©. Mes parents avaient l’habitude de le dire Ă  chacun.» 

Il a fait une pause un moment et regarda au plafond, comme s’il essayait de se rappeler en dĂ©tail, et il a souri encore plus. 

« Quand nous disons « Je te souhaite assez » nous souhaitons que l’autre personne ait une vie remplie de juste assez de bonnes choses pour les garder heureux. » 

Alors, se tournant vers moi, il a partagĂ© ce qui suit comme s’il rĂ©citait un texte mĂ©morisĂ©.

Je te souhaite assez de soleil pour maintenir ton attitude lumineuse peu importe que la journée soit grise et moche.
Je te souhaite assez de pluie pour apprécier le soleil encore plus.
Je te souhaite assez de bonheur pour maintenir ton esprit vivant et éternel.
Je te souhaite assez de douleur de sorte que mĂȘme la plus petite des joies dans la vie puisse te sembler grande.
Je te souhaite assez de gain pour satisfaire tes besoins.
Je te souhaite assez de perte pour apprécier tout ce que tu possÚdes.
Je te souhaite assez d’Au-revoirs pour te permettre de bien te rendre à l’Au-revoir final.

Il a alors commencĂ© Ă  pleurer et il s’est Ă©loignĂ©…       

Pour cette nouvelle annĂ©e qui s’annonce, je vous souhaite « Assez »â€ŠđŸ’—đŸ’žđŸ’“Â 

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21 commentaires sur « Danielle »

  1. trĂšs beau tout ça … tu me fais pleurer.
    Je te souhaite le doux, le doux partout, tous les jours. Le doux d’une plage, le doux du vent, le doux de la pluie, le doux d’un regard, d’une peau, d’un baiser… Le doux de l’Amour ; le doux de l’AmitiĂ©.
    Le doux pour une vie douce.
    Je t’embrasse doucement
    Colette

    Aimé par 1 personne

  2. je n’ai pas eu le courage de dire au revoir Ă  mon homme lors de son vivant en lui disant qu’il allait mourir ,et lĂ  je suis seule Ă  ce jour oĂč j’ai une impression que cette annĂ©e sera peut-ĂȘtre toujours prĂ©sente mĂȘme si je veux l’oublier,je suis mĂȘme prĂȘte Ă  partir loin mais ce ne serait que fuir ma douleur qui dure depuis son dĂ©cĂšs il y a quatre mois …pas prĂȘte pour une autre histoire d’amour car mon coeur n’est pas guĂ©ri…je dois faire mon deuil et avancer vers d’autres chemins et faire des dĂ©couvertes qui seront ensuite enrichissantes et gravĂ©es lĂ  dans ma tĂȘte et avoir aussi des coups de coeur mais pas sentimentaux,plus dans ma passion pour l’art…Passe d’agrĂ©ables moments pour ce dernier jour de cette annĂ©e…

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  3. Assez : c’est beau, simple et chaud.
    Tout souhaiter me semble trop pour accueillir l’instant. Trop pour que je reste dans mon territoire.
    Assez, c’est juste parfait.
    Merci Michael pour cette douce transmission.
    Je suis heureuse de cette annĂ©e qui se termine et prĂȘte pour le nouveau.
    Belle nuit et toi

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  4. Merci, Michael, pour ce beau et courageux texte.
    J’aurais envie de le transmettre comme voeux, si tu m’y autorises ?
    Cet « assez » fait Ă©cho au « suffisamment confortable »
    que je répÚte souvent dans mes cours de yoga, à propos des postures :
    « confortable » pour avoir envie d’y rester, de s’y installer
    et en mĂȘme temps « suffisamment inconfortable »
    pour qu’il s’y passe quelque chose, que la transformation s’opĂšre.
    C’est « le fil du rasoir » …
    Hugh chaleureux Ă  toi et « suffisamment » belle annĂ©e !
    Isabelle

    Aimé par 1 personne

  5. Je trouve ton texte magnifique et je suis trĂšs touchĂ© par sa justesse, comme une musique qui chante Ă  mon coeur autant qu’Ă  mon oreille. Merci MichaĂ«l.
    Je te souhaite « assez » pour tout ce qui vient Ă  toi.
    Je t’embrasse.

    Aimé par 1 personne

  6. Merci MichaĂ«l pour ce temoignage de ton vĂ©cu amoureux et de la leçon que j’enregistre:
     » plutĂŽt mourir de honte que de regrets ».

    Il se trouve que je pense a l’archange MichaĂ«l, depuis que je te connais et celui ci est de plus en plus present dans ma vie.
    La premiere carte que j’ai tirĂ©e du jeu de carte consacrĂ© a lui ( Doreen Virtue) m’a donnĂ© la priĂšre suivante:
     » Archange MichaĂ«l je vous en prie, entrez dans mes rĂȘves pour remplacer la peur par la foi.
    Emplissez-moi de force, de courage et de confiance »

    Aimé par 1 personne

  7. Bonsoir MickaĂ«l 🙂
    Je te souhaite une trÚs belle année lumineuse !!!
    Merci infiniment pour ce texte qui me touche profondément, et me fait vraiment réfléchir !!!
    Tes articles m’Ă©lĂšvent !!! Merci encore !!!
    Acceptes-tu que je le transmette comme mon message de vƓux ?
    Merci encore
    Au plaisir !

    Aimé par 1 personne

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