Les chemins de fer 

Amsterdam, Pays-Bas 🇳🇱 

Vers mes 45 ans, j’ai vécu quelque chose que je considère encore aujourd’hui comme un miracle parmi les miracles. J’étais au chômage depuis environ 3 ans, enchainant petit boulot après petit boulot, pour essayer infructueusement de joindre les deux bouts. J’avais une vieille moto, un Ténéré, qui avait du mal à démarrer et je venais de le changer pour un scooter d’occasion. J’ai fait un mauvais achat, car le scooter, un Majesty 250, avait un problème encore plus grand. 

Je me suis vraiment torturé à comprendre pourquoi je me trouvait dans cette galère. Je me suis dit que si je m’achetais des merdes pareilles, je ne m’estimais vraiment pas beaucoup. Pourtant, il fallait que je sois économe, car il ne me restait seulement 13.000 euros à tout casser. Je n’avais plus de revenu, ni le chômage, ni du soutien financier par ailleurs et je voyais mon compte bancaire fondre à vue d’oeil. Je savais que mes jours étaient comptés. Pour pas aspirer ma compagne dans mon sillage, j’avais prévu de la quitter quand le solde allait atteindre 5000 euros. J’avais prévu un scénario de survie que j’ai appelé plus tard “le scénario catastrophe”.    

Pourtant, il fallait faire quelque chose. Je sentais qu’il fallait faire un contre-pied, un acte d’Amour envers moi, un acte de bravoure et de foi… et affronter ma peur de tout perdre et de manquer le minimum nécessaire pour ma survie. Alors, j’ai décidé de m’offrir un scooter Burgman 400 tout neuf, d’une valeur de 7500 euros environ… plus de la moitié de mon capital. Je me souviens encore de mon angoisse face à ce défi… mais aussi de la sensation de liberté, de confort, de fierté et de bonheur qui en suivait. J’ai bien senti par la suite que je m’étais rapproché un petit peu plus de l’Amour. 

Scénario catastrophe

Deux cadeaux vraiment imprévus me sont arrivés. Le premier a été mon expérience d’éveil. A un moment précis, j’ai vécu de manière synchrone un ensemble d’événements qui m’ont provoqué une ouverture de conscience. C’était la fin de 17 ans de magie noire, la mort de mon meilleur ami-chien Boubou, un cumul important de mes problèmes intimes et l’acte de courage que je venais de poser. Mon expérience d’éveil a ensuite ouvert une porte et peu de temps après j’ai commencé à accompagner des gens. Mon scooter a été vraiment indispensable. 

Le deuxième cadeau a été aussi surprenant. Depuis la fin de la guerre, les victimes de l’holocauste recevaient des dédommagements mensuels appelés “Wiedergutmachung”. Bien évidemment, ça ne pouvait en aucun cas compenser les souffrances, les pertes de vies, ni les pertes matériels que les victimes ont subi. C’était comme des gouttes d’eau sur une plaque brulante. Très peu de temps après mon achat, l’organisation responsable des versements a décider de partager l’argent restant parmi les survivants. Ma mère était morte depuis 23 ans, donc elle ne pouvait pas en bénéficier… Mais moi, son enfant unique, j’ai eu droit à cette somme. Je l’ai reçu en 3 versement… un total de 70.000 francs, environ 12.000 euros !!! Magique non ???

Aujourd’hui, il se passe quelque chose de semblable. Je viens de terminer un cycle, une vie. J’ai pris des décisions importantes où j’affronte encore une fois des peurs pour m’approcher de l’Amour. La porte d’Israël s’ouvre pour moi et je saute dans l’inconnu sans savoir où j’atterrirai, ni même si je vais tenir le choc. Je considère ce qui vient d’arriver comme un signe qui confirme le bien fondé de mon élan.

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Il y a quelques jours, quand j’étais avec l’amie de ma mère, elle m’a dit que les chemins de fer allaient rembourser leur dette aux victimes également… et que j’y avais droit aussi. Il parait qu’ils ont été payés par les Nazis pour le transport de chaque juif vers les camps de concentration, jusqu’à 1944. N’oublions pas non plus ce qui a été abandonné sur les quais des gares. L’ensemble correspond à une somme gigantesque. Il y a quelques années, un homme connu semble avoir abordé ce sujet ici aux Pays-bas. Le résultat est, qu’aujourd’hui les chemins de fer offrent une somme d’environ 15.000 euros à chaque survivant… ou 5000 euros à leur descendance… dont moi !

Avec Ruben, j’ai rapidement rempli le formulaire en ligne et j’y ai joint les documents nécessaires que j’avais encore dans mon ordi. Ils vont vérifier maintenant si ma mère a belle et bien été transporté avant 1944 et que je suis bien son héritier. C’était en 1942 pour elle, car elle est restée en Bergen-Belsen pendant 2 ans et demi, jusqu’à la libération. Donc tout est limpide. Il peut y avoir juste un seul hic. Sur mon acte de naissance, ma mère figure sous son nom juif, Tova… alors que dans ma déclaration et les registres ailleurs elle est nommée par son vrai nom, Phoebe. 

Mais, ça ne change en rien la magie avec laquelle une somme pareil risque de venir encore une fois dans ma direction. J’aurai de quoi couvrir mes frais en Israël pendant un petit moment ! Je le saurait dans quelques semaines. Je pense qu’ils me contacteront en cas de doute. Au cas où, j’ai encore un certificat de succession avec nos noms liés. Certes, les juifs ne pourraient jamais réclamer leur dû. Même après la guerre, les gens continuaient à mourrir des conséquences de leur vécu dans les camps. Même leurs enfants vivent souvent avec des traumatismes irrécupérables et attrapent des pathologies liées transmises par leurs parents. 

J’ai une cousine dans cette situation. Heureusement que mes années de thérapie et de cheminement m’ont libéré de tout ça aussi. Et même si ces sommes semblent des gouttes dans l’océan par rapport à l’irrécupérable, je les vois comme des cadeaux qui viennent à point nommé dans mon histoire. Merci, merci, merci !

∞💜∞

Frissons…


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